Friday, May 17, 2024
Friday, May 17, 2024
Get the Daily
Briefing by Email

Subscribe

SITUATION D’URGENCE: EGYPT ET LE MONDE ARABE

Egypte : ce qu'implique le retour de l'état d'urgence
Le Monde, 15 aout 2013

 

En décrétant l'état d'urgence dans la moitié du pays après une journée sanglante d'affrontements entre la police et les pro-Morsi, le gouvernement de transition mis sur pied par l'armée égyptienne n'a pas manqué de raviver le souvenir du régime d'Hosni Moubarak, renversé en 2011 par la révolution.

 

Etat d'urgence levé en 2012, partiellement rétabli en 2013

 

Cette loi d'exception, imposée en 1981 après l'assassinat du président Anouar El-Sadate par des islamistes, avait en effet été reconduite sans discontinuer pendant les trente ans de la présidence Moubarak, en dépit de sa promesse de l'abrogeren 2005. Symbole de la répression et de l'arbitraire de l'ancien régime, il n’avait été levé que le 31 mai 2012 par le Conseil supérieur des forces armées (CFSA), organe militaire alors à la tête du pays. Soit plus d'un an après le départ de Moubarak, et deux semaines avant l'élection de Mohamed Morsi à la présidence.

 

La levée de l'état d'urgence faisait partie des principales revendications de ceux qui avaient lancé la révolte en 2011. Mais elle n'avait pas entièrement satisfait les défenseurs des droits de l'homme. Selon les termes de la déclaration constitutionnelle approuvée en mars 2011 par référendum, l'armée restait en effet responsable de la protection du pays, laissant ouverte la possibilité d'avoir encore recours à cette méthode.

Sous la présidence de Mohamed Morsi, l'état d'urgence avait été rétabli à une occasion : le 28 janvier, état d'urgence et couvre-feu avaient été décrétés pour un mois à Port-Saïd, Suez et Ismaïlia, après des affrontements entre les opposants au président islamiste et l'armée, dans une configuration symétrique à celle d'aujourd'hui.

 

Tribunaux d'exception et restriction des libertés

 

Défini par le décret-loi n° 162 de 1958, l'état d'urgence en Egypte permet d'interdire les rassemblements politiques sans l'accord des autorités. Il autorise les forces de sécurité :
d'arrêter et fouiller sans restriction les personnes présentant une menace ;

 

de contourner la procédure pénale pour garder en détention des suspects sans mandat et pendant des années ;

 

de surveiller les communications et les médias ;

d'interdire le port d'arme.

 

Cette loi a permis au régime d'Hosni Moubarak de détenir environ 17 000 prisonniers politiques sans jugement, selon l'ONG Amnesty International. Juridiquement, elle n'autorise pas la torture et autres actes criminels, qui continuent d'être considérés comme des délits, comme le notait une agence de l’ONU en 2001.

 

Toutefois, comme l’explique un juriste égyptien au Figaro, "la mise en place de l'état d'urgence n'entraîne pas automatiquement l'instauration de toutes les mesures". Il revient à Adli Mansour, président par intérim nommé par les militaires, de choisir quelles mesures seront appliquées. La première d'entre elles a été l'instauration d'un couvre-feu dans quatorze provinces, dont celle du Caire, entre 19 heures et 6 heures du matin. Le gouvernement a menacé tout contrevenant d'une peine de prison.

 

En annonçant l'état d'urgence, Adli Mansour a expliqué qu'il avait "donné pour mission aux forces armées, en coopération avec la police, de prendre toutes les mesures nécessaires pour maintenir la sécurité et l'ordre ainsi que pour protéger les biens publics et privés et les vies des citoyens". Selon lui, "la sécurité et l'ordre dans la nation" sont mis en danger par les "actes perpétrés par des groupes extrémistes".

 

L’Egypte impose un Blocus à Gaza : où sont les flotilles de ravitaillement et les pleureuses humanitaires?

Khaled Abu Toameh

Europe Israel, aout 2013

 

Les militants ne se soucient pas autant de la souffrance des Palestiniens que de la poursuite de leur programme anti-Israël. Ils ont rarement quelque chose de bon à offrir aux Palestiniens.

 

Le Hamas a finalement admis que ce sont les Égyptiens, et non les Israéliens, qui ont transformé la bande de Gaza en une «grande prison».

 

Ghazi Hamad, un haut fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères contrôlé par le Hamas, a été cité cette semaine disant que la bande de Gaza a été transformée en une grande prison à la suite de la fermeture continue du passage de Rafah par les autorités égyptiennes depuis le 30 Juin.

 

Hamad a déclaré que, depuis lors, le nombre de voyageurs palestiniens au terminal de Rafah est passé de 1.200 à 200 par jour.

 

Mais cet événement n’a pas été répercuté dans les pages des grands journaux occidentaux,  parce qu’il «n’implique » en aucune façon  Israël.

 

Pour aggraver les choses, les autorités égyptiennes ont annoncé que le terminal de Rafah serait complètement fermé pendant la fête musulmane de quatre jours de l’Aïd al-Fitr, qui a commencé le 8 Août.

 

Jusqu’à récemment, l’accusation selon laquelle la bande de Gaza était transformée en une « grande prison » avait été faite seulement contre Israël, histoire de capter l’attention des médias et des organisations de défense des droits humains à travers le monde.

Mais maintenant que l’accusation est pointée sur l’Egypte, la plupart des journalistes internationaux, les organisations des droits humains et même des groupes «pro-palestiniens», en particulier sur les campus universitaires aux États-Unis, le Canada et l’Australie, ont choisi de regarder les choses d’une autre façon.

 

Les résidents de la bande de Gaza se posent ces jours-ci les questions suivantes : Où sont toutes les missions de solidarité étrangères qui avaient l’habitude de visiter la bande de Gaza pour montrer leur soutien au Hamas et à la population palestinienne? Où sont tous les médias, les groupes de défense des droits humains, les militants?

En Juillet, seules deux délégations étrangères ont visité la bande de Gaza. En comparaison, entre Janvier et Juin de cette année, environ 180 délégations sont entrées sur la bande de Gaza.

 

Les militants «pro-palestiniens» disent qu’ils sont incapables d’entrer dans la bande de Gaza en raison des mesures de sécurité strictes et des restrictions de déplacement imposées par les autorités égyptiennes.

 

Mais pourquoi ces militants n’ont-ils pas tenté d’organiser une nouvelle flotille d’aide humanitaire pour la bande de Gaza pour briser le blocus égyptien?

 

Pourquoi les militants « pro-palestiniens » n’ont-ils pas  été envoyés du côté égyptien du passage de Rafah pour exprimer leur solidarité avec les habitants de la «grande prison»?

La réponse est évidente: d’abord, l’objectif principal des militants est de condamner Israël et de le maintenir comme seul responsable de la misère des Palestiniens.

Les militants ne se soucient pas autant de la souffrance des Palestiniens que de l’avancement de leur programme anti-Israël. Ils consacrent l’essentiel de leurs énergies et de leurs efforts à inciter la réprobation  d’Israël et ont rarement quelque chose de bon à offrir aux Palestiniens.

 

Deuxièmement, les militants «pro-palestiniens» savent qu’il serait insensé de leur part de se mêler des affaires de l’armée égyptienne et des forces de sécurité. La dernière fois que des ressortissants étrangers ont tenté d’organiser une manifestation pacifique du côté égyptien du terminal de Rafah, les autorités égyptiennes n’ont pas hésité à lancer l’assaut et expulser beaucoup d’entre eux de la région.

 

De même, il y a une manipulation dans la manière dont les médias internationaux traitent la crise actuelle dans la bande de Gaza.

 

Alors que les autorités égyptiennes resserrent le blocus sur la bande de Gaza, des dizaines de camions chargés de marchandises et de matériel de construction continuent d’entrer dans la zone par le terminal d’Erez en provenance d’Israël.

Rien que cette semaine, plus de 500 camions contenant une variété de marchandises et 86 tonnes de gaz de cuisine ont été livrés aux résidents de la bande de Gaza par le terminal d’Erez.

 

Dans la dernière semaine de Juillet, 1.378 camions transportant 37 306 tonnes de marchandises sont entrés dans la bande de Gaza en provenance d’Israël et un total de 2.203 personnes sont pasés par le terminal d’Erez.

 

Depuis le début de l’année, près de 34.000 camions transportant plus de 950.000 tonnes de marchandises sont entrés sur la bande de Gaza par Israël.

 

Les Egyptiens, comme la plupart des Arabes, ne se soucient pas des Palestiniens. Ils veulent que les Palestiniens soient le problème d’Israël et qu’ils puissent continuer à compter sur les aumônes des pays occidentaux.

 

Les Arabes ne se soucient pas que les habitants de la bande de Gaza meurent de faim du moment que c’est Israël qui reçoit le blâme.

 

Alors pourquoi les pays arabes s’en feraient puisque la communauté internationale et les médias continuent d’adopter une attitude d’autruche en ce qui concerne la responsabilité de l’Egypte pour l’aggravation de la crise humanitaire et économique dans la bande de Gaza?

 

Les guerres de religion arabes
Shlomo Ben-Ami

Projet Syndicat, 05 aout 2013

 

MADRID – Partout dans le monde arabe se déroule à présent une lutte entre deux grandes forces historiques, la religion et la laïcité. C'est le type de bataille entre César et Dieu que l'Europe a mis des siècles à résoudre. L'avenir du Moyen-Orient arabe se décidera dans la lutte entre les insurgés sunnites syriens, soutenus dans toute la région par les wahhabites saoudiens (les patrons de l'intégrisme religieux) et son régime Baas laïque, entre fondamentalistes du Hamas et l'OLP laïque en Palestine; et entre l'opposition des jeunes laïcs en Egypte issue des manifestations de la place Tahrir et les Frères musulmans et les salafistes radicaux.

 

Jusqu'à présent, les révoltes arabes ont justifié l'hypothèse selon laquelle compte tenu de la structure de la plupart des sociétés arabes, renverser les autocraties laïques revient inévitablement à ouvrir la porte à des démocraties islamiques. Nous avons vu se dérouler cette dynamique en Algérie au début des années 1990 avec la victoire au premier tour le du Front Islamique du Salut aux élections législatives (ce qui a incité l'annulation du second tour), avec la victoire électorale du Hamas en Palestine en 2006 et plus récemment avec la montée démocrate des Frères musulmans au pouvoir en Egypte.

 

En Algérie et en Egypte, les forces laïques ont été incapables d'endiguer la montée de l'Islam politique, qui ne pourra être écourtée que par un coup d'Etat militaire. Le coup d'Etat militaire algérien a finalement marqué le début d'une guerre civile sanglante estimée à plus de 200 000 morts.

 

Les conséquences du coup d'Etat égyptien doivent encore se faire connaître. L'accession au pouvoir de l'opposition laïque appuyée par des blindés risque de nourrir la colère des islamistes dans les années à venir. La perte de confiance des Frères musulmans dans le processus démocratique serait une mauvaise nouvelle pour l'Egypte et un coup de pouce à Al-Qaïda et à d'autres djihadistes qui croient que le pouvoir ne s'obtient que par le sang et la terreur.

 

Le concept de la séparation de l'Église et de l'État est étranger à l'Islam (l'ancien guide suprême iranien, l'ayatollah Ruhollah Khomeini a déclaré que « l'Islam est politique ou n'est rien ») et les islamistes doivent encore prouver qu'ils se prêtent à la gouvernance démocratique. En effet, Mohamed Morsi, le président déchu de l'Egypte, ne doit s'en prendre qu'à lui pour sa fin politique. Son comportement sectaire et autoritaire a divisé son pays à un tel point que même le chef de l'armée, le général Abdel Fattah Al-Sissi, connu pour ses sympathies islamistes, a retiré son soutien à l'homme qui l'avait nommé.

De même, la reprise de la guerre civile entre chiites et sunnites en Irak reflète largement la règle sectaire du Premier ministre Nouri al-Maliki. L'accession au pouvoir du Hamas à Gaza n'a pas non plus produit une gouvernance démocratique ouverte. Après avoir échoué à renverser la victoire électorale du Hamas par des moyens militaires, l'OLP s'est mis d'accord avec ses rivaux islamistes sur un plan de réconciliation nationale, mais ce pacte est resté lettre morte.

 

Quant à la Syrie, la révolte contre l'une des autocraties les plus laïques du monde arabe a dégénéré en une lutte à mort entre sunnites et chiites qui s'étend à d'autres pays de la région. Un jihad sunnite a été lancé contre le régime Baas et ses alliés chiites, l'Iran et le Hezbollah. Le Liban voisin, avec sa forte division entre sunnites et chiites, est déjà directement affecté.

 

La lutte entre la religion et l'Etat au Maghreb est moins violente, mais néanmoins potentiellement explosive. La Tunisie où le Printemps arabe a commencé, connaît maintenant une impasse entre laïcs et fondamentalistes religieux. Le parti islamiste Ennahda dirige le gouvernement, mais fait face à un sérieux défi des salafistes ultra-conservateurs du Hizb ut-Tahrir.

 

Au Maroc le Roi Mohammed VI n'a pas caché son soutien au coup d'Etat égyptien, mais le Parti de la Justice et du Développement, de tendance islamiste à la tête de son gouvernement, l'a dénoncé. En effet, l'Istiqlal, un parti de centre-droit laïque, a quitté le gouvernement à la suite du coup d'Etat égyptien, en accusant le PJD dirigé par le Premier ministre Abdelilah Benkirane, d'essayer de « d'égyptianiser » le Maroc pour monopoliser le pouvoir, comme Morsi l'a fait en Égypte.

 

Même en Turquie, pays musulman non arabe aux fortes aspirations à concilier l'Islam avec la démocratie, l'accord se défait entre le gouvernement islamiste du Premier ministre Recep Tayyip Erdoğan et la classe moyenne urbaine pour limiter l'empiètement officiel sur les modes de vie laïques. Erdoğan promet maintenant de « reconstruire la Turquie » selon son image autoritaire et religieuse.

 

La marche vers la liberté des Arabes sera nécessairement un processus long et tortueux, peut-être la principale épreuve géopolitique du XXIème siècle. Pourtant la bataille entre laïcité et religion dans le monde arabe ne doit pas pour autant durer des siècles comme en Europe, pour la bonne raison que les générations contemporaines peuvent bénéficier du long processus de progrès social et scientifique qui a permis à l'Occident d'ouvrir la voie à la démocratie moderne. Mais l'adaptation de cet héritage occidental dans le monde arabe contemporain, ainsi que la récupération de son propre patrimoine médiéval de tolérance et d'excellence scientifique des Arabes, s'annonce difficile.

 

Il faut espérer que les islamistes vaincus en l'Egypte évolueront d'une politique de vengeance vers un processus de remise en question, qui conduira à reconnaître que la démocratie n'est pas un jeu à somme nulle dans lequel un seul gagnant rafle toute la mise. Le « centralisme démocratique » léniniste auquel Morsi semblait avoir souscrit sera une provocation permanente envers les nouvelles générations et leurs alliés au sein de l'ancien appareil d'Etat : ils se soulèveront même au prix d'une guerre civile.

Donate CIJR

Become a CIJR Supporting Member!

Most Recent Articles

HELP CIJR GET THE MESSAGE ACROSS

0
"For the second time this year, it is my greatest merit to lead you into battle and to fight together.  On this day 80...

Day 5 of the War: Israel Internalizes the Horrors, and Knows Its Survival Is...

0
David Horovitz Times of Israel, Oct. 11, 2023 “The more credible assessments are that the regime in Iran, avowedly bent on Israel’s elimination, did not work...

Sukkah in the Skies with Diamonds

0
  Gershon Winkler Isranet.org, Oct. 14, 2022 “But my father, he was unconcerned that he and his sukkah could conceivably - at any moment - break loose...

Open Letter to the Students of Concordia re: CUTV

0
Abigail Hirsch AskAbigail Productions, Dec. 6, 2014 My name is Abigail Hirsch. I have been an active volunteer at CUTV (Concordia University Television) prior to its...

Subscribe Now!

Subscribe now to receive the
free Daily Briefing by email

  • This field is for validation purposes and should be left unchanged.

  • Subscribe to the Daily Briefing

  • This field is for validation purposes and should be left unchanged.