‘La Charte du P.Q. c’est du pur délire’
Elias Levy
cjnews.com, 18 septembre, 2013
Julien Bauer vit au Québec depuis 1967. Il est Professeur au Département de Science Politique de l’Université du Québec à Montréal (U.Q.A.M.) depuis 1975. Il est le seul Professeur de l’U.Q.A.M. de confession juive à porter la Kippa.
“Je n’arbore pas une Kippa par ethnocentrisme ou par goût de la provocation, mais tout simplement parce que ce symbole cardinal de la religion juive fait partie intégrante de mon Identité”, nous a dit en entrevue ce descendant d’une lignée rabbinique renommée du Judaïsme français.
Les liens sulfureux existant entre le politique et le religieux, Julien Bauer en connaît un bout. Il a même consacré un excellent essai à ce sujet très épineux, Politique et Religion (Presses Universitaires de France, Collection “Que sais-je?”, 1999). Auteur d’une dizaine d’ouvrages, dont plusieurs sont devenus des livres de référence dans les milieux universitaires, ce spécialiste reconnu en Administration publique -discipline qu’il enseigne à l’U.Q.A.M. depuis 38 ans- qualifie sans ambages d’“aberration” et “pur délire” le Projet de Charte des valeurs québécoises concocté par le Gouvernement du Parti Québécois dirigé par Pauline Marois.
Julien Bauer est bien conscient qu’il est dans la ligne de mire des concepteurs de ce Projet socio-identitaire très controversé.
“Que je porte une Kippa, ça n’a jamais dérangé personne à l’U.Q.A.M. Ce qui ulcère parfois mes collègues antisionistes, ce sont mes positions farouchement pro-Israël. Depuis que le Parti Québécois a présenté ce Projet aberrant, qui est en train de diviser profondément les Québécois, tous mes collègues de travail, y compris ceux qui sont foncièrement anti-israéliens, sont venus me dire qu’ils trouvaient que cette Charte des valeurs québécoises est absolument délirante.”
La réponse cinglante de Julien Bauer aux Péquistes s’échinant à mettre en oeuvre ce Projet de Charte vigoureusement rejeté par toutes les Communautés culturelles du Québec: “Je viens de commander à Jérusalem une nouvelle Kippa blanche, qui sera spécialement tricotée pour moi, sur laquelle sera brodé en couleur bleue le logo de mon Université: U.Q.A.M.”
Avant d’enseigner à l’U.Q.A.M., Julien Bauer a travaillé pendant plusieurs années dans la Fonction publique québécoise. À l’époque, parmi les quelque 30 000 fonctionnaires québécois, on ne dénombrait que 3 Juifs. Aujourd’hui, la Fonction publique québécoise compte dans ses rangs un peu plus de Juifs, mais ces derniers constituent toujours “une infime minorité”, rappelle-t-il
“Le principal objectif de mon travail dans la Fonction publique était de faire fonctionner l’État. Ensuite, ma fonction comme Professeur à l’U.Q.AM., Université où j’enseigne depuis 38 ans l’Administration publique, consiste à former des étudiants qui dans leur vie professionnelle seront amenés à jouer un rôle constructif dans la société. Or, aujourd’hui, avec son Projet de Charte totalement débile, le Parti Québécois vient me dire: “Tu ne fais pas partie des meubles québécois, tu n’es qu’un maudit étranger!” On ne me dit pas explicitement: “Rentre chez toi maudit étranger”, mais c’est ce que cette Charte abominable me dit. En fait, cette Charte totalement délirante n’est pas seulement une insulte à mon endroit comme individu, celle-ci est aussi une attaque véhémente contre les valeurs de la vie en société dans une démocratie.”
Pour Julien Bauer, la Charte des valeurs québécoises est “un retour au passé le plus sinistre du Québec”.
“Tout en se drapant dans un vocabulaire moderne, pseudo-gauchiste, cette Charte nous convie à retourner à l’époque noire et honteuse de Maurice Duplessis. Le fait même de défendre le maintien du Crucifix, imposé par Maurice Duplessis au début des années 30, dans le Salon des débats de l’Assemblée Nationale du Québec, indique clairement que le Parti Québécois, qui, à mon humble avis, n’a jamais été un Parti de gauche -mais ça c’est un autre débat-, est le fier successeur de l’Union Nationale de Maurice Duplessis, c’est-à-dire un Parti obscurantiste et des plus sectaires incarnant les valeurs les plus régressives de la société québécoise”.
Quand Julien Bauer est arrivé avec sa famille au Québec à la fin des années 60, beaucoup de Québécois allaient encore à la Messe le dimanche, les Québécoises avaient alors 8, 10 ou 12 enfants… se rappelle-t-il.
“Ce qui est étonnant, c’est que le Parti Québécois n’a retenu du Patrimoine québécois que le Crucifix, c’est-à-dire un objet religieux qui incarne sans la moindre ambiguïté une supériorité des Québécois Catholiques, qui ne croient plus en rien, par rapport aux autres religions. C’est ça qui est exaspérant. Dire dans une même phrase: “On est pour la laïcité, mais on tient mordicus à maintenir la Croix”, c’est une contradiction sidérante. Ça ne tient pas debout!”
Julien Bauer craint-il que l’U.Q.A.M., une Institution d’Études supérieures publique financée à 100% par le Gouvernement du Québec, mette en oeuvre cette Charte des valeurs si celle-ci est prochainement adoptée sous forme de Loi par l’Assemblée Nationale du Québec?
“Sur le plan légal, dans les Statuts de l’U.Q.A.M., il est clairement indiqué que cette Université est laïque. N’étant pas Prophète, j’ignore complètement comment l’U.Q.A.M. se positionnera face à cette Charte des valeurs. Personnellement, je suis contre l’option proposée à certaines Institutions publiques québécoises, dont les Universités, si jamais ce Projet venait à être adopté par le Parlement de Québec, de se prévaloir de la Clause dérogatoire, applicable durant cinq années et éventuellement renouvelable. Quand une Loi est débile, on ne l’applique pas. Point final! Soyons clairs. Comme dans le cas de la Loi 101 sur la Langue française, la seule façon d’appliquer une Loi imposant cette Charte des valeurs québécoises, ce sera sur une base de dénonciation. Des salopards qui dénoncent des concitoyens, il y en a toujours eus et il y en aura toujours. Le Gouvernement du Parti Québécois sera obligé de créer un Office des signes religieux ostentatoires, qui dépêchera sur le terrain des inspecteurs zélés pour vérifier la taille des Kippas, des Croix, des Étoiles musulmanes… Ce sera alors le délire complet! Du point de vue de la vie en société dans une démocratie, ce Projet de Charte est inadmissible. D’un point de vue très pratique, mon domaine est quand même l’Administration et les Politiques publiques, une telle Loi ne pourra être appliquée. Alors, tant qu’à faire une grande imbécilité qui ne pourra jamais être appliquée juridiquement, il vaut mieux abandonner ce Projet très farfelu. C’est l’honneur et l’avenir du Québec qui sont en jeu!”
Les dommages collatéraux du projet de charte des valeurs québécoises
David Bensoussan
Huffington Post, 22 septembre 2013
Le projet de charte des valeurs québécoises dépasse largement la problématique à laquelle il veut remédier. Des effets secondaires de très grande importance secouent la société montréalaise visée au premier plan, notamment les anglophones et une partie importante de la population des immigrants.
Lors de mes études de doctorat à l’Université McGill dans les années 70, j’ai pu constater que la majorité des finissants cherchaient à se placer dans le milieu du travail… ailleurs. L’idée de chercher du travail au Québec ne les effleurait même pas tant ils étaient convaincus qu’on ne voulait pas d’eux. Cette perception a donné lieu à un exode qui a des plus appauvri Montréal sur les plans économique et culturel. Cette perception refait surface aujourd’hui dans la communauté anglophone, certains se demandant s’ils ne devraient pas pousser leurs enfants à quitter le Québec pour un mieux-être, car ces personnes perçoivent les mesures restrictives prévues par cette charte comme étant exclusivistes, mesures qui depuis les années 70 continuent le processus de dégradation de leurs droits et libertés. Le fossé existant entre le Québec et le Kwebec va s’élargissant.
Bien que le débat sur la laïcité concerne en principe toutes les confessions religieuses, beaucoup gardent présent à l’esprit un malaise manifeste devant un certain radicalisme musulman. Ces dernières décennies, la planète a été témoin de massacres de millions de personnes dont la majorité découle de luttes intermusulmanes, compte non tenu d’actes terroristes ciblant des innocents à travers le monde. Or, les normes restrictives associées à ce débat sont réinterprétées par les radicaux islamistes qui prétendent parler au nom des arabo-musulmans et qui cherchent à faire des émules en voulant développer une mentalité d’assiégés chez les modérés. Ces radicaux ne sont pas contrecarrés par la majorité des modérés, et pour cause : dans les pays d’origine, se tenir coi en matière d’opinions politiques était le garant d’une protection contre des abus du pouvoir. La majorité des modérés n’a pas saisi l’opportunité de s’exprimer librement et de se démarquer des radicaux, ce qui en démocratie relève non seulement du droit, mais parfois même d’un devoir citoyen. Ainsi, les radicaux se réjouissent du débat, le public les perçoit comme l’expression de l’ensemble de la société musulmane laquelle continue de traverser une situation pénible.
Un projet de charte ne gouverne pas la perception qu’on en a lorsque l’esprit de la charte est brouillé par des considérations secondes. Le débat sur la laïcité a dérapé, car il a été accompagné de remarques sur les prétendus effets pervers du multiculturalisme. On a été jusqu’à vanter la laïcité française comme étant un parangon d’intégration alors que l’on y arrive à incendier près de 25 000 voitures en un an dans des banlieues « à problèmes.» De ce fait, le débat dérive vers des amalgames faciles et vers des considérations qui sont loin de se limiter à la laïcité proprement dite. Supposer que l’on soit réticent à se faire soigner par un porteur d’une croix, d’une kippa ou d’un foulard, c’est insulter la mémoire des religieuses couvertes de coiffe des bonnes sœurs qui ont soigné des générations de Québécois avec un dévouement et une abnégation exceptionnels.
Le Canada tout comme le Québec est dit-on, le pays des deux solitudes lesquelles ont appris à vivre ensemble en dépit des distinctions religieuses et nationales et en dépit des imperfections de la cohabitation. Pour bien des nations, le Canada est un phare et un exemple, car l’accommodement entre ses principaux peuples a évité des dérapages qui furent meurtriers ailleurs. Dans le village global qu’est devenue la planète, le visage humain du Canada et du Québec change. Dans notre société en mutation, il nous revient d’envisager un débat non partisan qui soit inclusif, serein et respectueux des différences.
Pour le bien de tout un chacun.
Que les réfugiés demeurent dans leurs aires culturelles respectives
Daniel Pipes
The Washington Times, 24 septembre 2013
Adaptation française: Johan Bourlard
L’accalmie que connaît la crise des armes chimiques nous offre l’occasion de nous pencher sur le flot impressionnant de réfugiés quittant la Syrie et de reconsidérer quelques opinions malencontreuses à propos de leur avenir.
Environ dix pour cent des 22 millions d’habitants que compte la Syrie ont fuit le pays, la plupart vers les États voisins – le Liban, la Jordanie et la Turquie – dont les gouvernements, incapables d’y faire face, limitent le passage aux frontières, une attitude qui a suscité des inquiétudes au sujet de la situation désespérée de la Syrie. Le haut commissaire des Nations unies pour les réfugiés, António Guterres, suggère (d’après le Guardian qui le cite) que son agence « cherche à installer des dizaines de milliers de réfugiés syriens dans des pays qui soient plus en mesure de les accueillir », rappelant par là le programme de réinstallation d’après 2003 qui a permis à 100.000 Irakiens de s’établir en Occident. D’autres aussi se tournent instinctivement vers l’Occident pour trouver une solution. À titre d’exemple, la Conférence des évêques catholiques des États-Unis a appelé les États occidentaux « à faire davantage » pour les réfugiés syriens.
L’appel a été entendu : le Canada a proposé d’accueillir 1300 réfugiés syriens et les États-Unis 2000. L’Italie a recueilli 4600 réfugiés syriens arrivés par bateaux. L’Allemagne a proposé d’en accueillir 5000 (dont une partie est déjà arrivée). La Suède a offert l’asile aux 15.000 Syriens déjà présents dans le pays. Des groupes d’habitants se préparent à un afflux massif dans tout l’Occident.
Toutefois ces chiffres sont bien en-deçà d’une population qui se compte en millions. Par conséquent, l’Occident ne peut à lui seul résoudre le problème des réfugiés syriens. En outre beaucoup dans les pays occidentaux (particulièrement dans des pays européens comme les Pays-Bas et la Suisse) sont lassés d’accueillir des musulmans qui ne s’assimilent pas et qui, au contraire, cherchent à remplacer les mœurs occidentales par la loi islamique, la charia. La chancelière allemande Angela Merkel et le Premier ministre britannique David Cameron considèrent tous deux ce multiculturalisme qui prône l’égalité de toutes les civilisations, comme un échec. Pire, on assiste à l’émergence de mouvements fascistes comme l’Aube dorée en Grèce.
Et il est probable que beaucoup plus de réfugiés musulmans soient sur le même chemin. En plus des Syriens, il faut ajouter des Bangladais, des Pakistanais, des Afghans, des Iraniens, des Irakiens, des Libanais, des Palestiniens, des Égyptiens, des Somaliens et des Algériens. Les ressortissants d’autres pays comme le Yémen et la Tunisie pourraient bientôt les rejoindre.
Heureusement il existe une solution.
Pour installer les Syriens dans « dans des pays qui soient plus en mesure de les accueillir », comme le dit avec délicatesse Guterres, il suffit de détourner le regard de l’Occident à majorité chrétienne vers les vastes étendues inoccupées du royaume fabuleusement riche d’Arabie saoudite ainsi que vers des États plus petits mais parfois encore plus riches comme le Koweït, Bahreïn, le Qatar et les Émirats arabes unis. Pour commencer, ces pays (que je regroupe sous le nom d’Arabie) sont bien plus adaptés pour le rapatriement vers la Syrie que des pays comme par exemple la Nouvelle-Zélande. Vivre là signifie aussi ne pas devoir endurer des climats rigoureux (comme en Suède) ni apprendre des langues difficiles et peu parlées comme le danois.
Aussi et surtout, les musulmans d’Arabie partagent des liens religieux profonds avec leurs frères et sœurs syriens. Ainsi s’établir là-bas évite les contraintes que présente la vie en Occident. Il suffit de considérer certains des éléments haram (interdits) que les réfugiés musulmans éviteraient en vivant en Arabie :
-Les chiens de compagnie (on en compte 61 millions rien qu’aux États-Unis).
-Une cuisine où le porc abonde et une vie sociale où l’alcool coule à flots.
-Des loteries sponsorisées par l’État et des temples de style Las Vegas dédiés au jeu.
-Des femmes aux tenues indécentes, la danse, les concours de beauté en maillot de bain, les femmes célibataires vivant seules, se baignant et ayant des rendez-vous avec des hommes, et la prostitution légale.
-Les bars lesbiens, les parades homosexuelles et le mariage gay.
-Une attitude laxiste face aux substances hallucinogènes avec dans certains systèmes juridiques une légalisation des drogues.
-Des romans blasphématoires, des personnalités politiques opposées au Coran, des organisations de musulmans apostats et un pasteur qui à plusieurs reprises et publiquement brûle des exemplaires du Coran.
Au lieu de tout cela, les musulmans vivant en Arabie peuvent se réjouir d’un code de lois qui (contrairement à l’Irlande) permet la polygamie et (contrairement à la Grande-Bretagne) autorise le mariage des enfants. Contrairement à la France, l’Arabie considère comme défendable le fait pour un homme de battre sa femme et se montre conciliante au sujet de la mutilation génitale des femmes. Contrairement aux États-Unis, la pratique de l’esclavage ne conduit pas à la prison et les hommes qui commettent un crime d’honneur sur les femmes de leur famille ne doivent pas craindre la peine de mort.
L’exemple des Syriens et de l’Arabie s’inscrit dans un cadre beaucoup plus large : indépendamment de leur nombre, les réfugiés devraient être acceptés et encouragés à rester dans leur propre aire culturelle, là où ils sont susceptibles de s’intégrer le plus aisément, de garder le plus fidèlement leurs traditions, de causer le moins de perturbations au sein de la société d’accueil et d’où ils pourraient retourner chez eux le plus facilement. Ainsi les gens d’Asie du Sud-Est devraient se réfugier d’une façon générale en Asie du Sud-Est, les gens du Moyen-Orient au Moyen-Orient, les Africains en Afrique et les Occidentaux en Occident.
Conseil à l’ONU : concentrez-vous moins sur l’Occident et davantage sur le reste du monde. Conseil également aux Saoudiens : il est temps d’accueillir à bras ouverts des coreligionnaires musulmans opprimés.