“ERDOGAN EST-IL UN NOUVEL HITLER ?”
Franz-Olivier Giesbert
24 mai, 2018
Il y a quelque chose d’obscène à comparer à Hitler le moindre tyranneau étranger ou politicien français et à assimiler au nazisme les déclarations déplaisantes ou xénophobes. Tels sont les effets de la banalisation du mal, pont aux ânes de la nouvelle doxa.
Dans un débat, le meilleur moyen de faire taire un contradicteur est de hurler au fascisme, au nazisme. La tendance n’a cessé de se développer, ces dernières décennies, au point qu’a été promulguée la loi de Godwin, du nom de son farceur d’inventeur qui a décrété que plus une discussion dure, plus grande est la probabilité que surgissent des comparaisons avec Hitler ou les nazis.
S’il ne faut pas abuser des comparaisons, reconnaissons que sont innombrables les rapprochements possibles entre le Führer et Recep Tayyip Erdogan, le dictateur élu de Turquie, le moindre n’étant pas qu’ils apparaissent tous deux comme des produits avariés de la démocratie. Ce sont les urnes qui ont porté Hitler au pouvoir en 1933. Fort de sa majorité au Parlement, il put ensuite avoir recours à l’Acte générateur qui lui donna les pleins pouvoirs jusqu’à la chute du IIIe Reich, en 1945.
Hitler l’a fait, Erdogan marche sur ses pas. L’an dernier, le numéro un turc a remporté (à 51 % seulement) la majorité à un référendum constitutionnel, ce qui lui permettra de disposer, dès 2019, de nouvelles prérogatives dans le cadre de l’hyperprésidentialisation du régime. Sans aucun contre-pouvoir, le président pourra gouverner par décret, décider seul de l’état d’urgence, nommer les hauts fonctionnaires, tout en restant à la tête de l’AKP, son parti islamo-conservateur.
Défendant ce type de régime « présidentiel », Erdogan déclarait la veille du Nouvel An 2016 : « Il y a actuellement des exemples dans le monde et des exemples dans l’Histoire. Vous en aurez l’exemple dans l’Allemagne nazie. » Apparemment, sa langue avait fourché et son surmoi, craqué. Le palais présidentiel s’était fendu peu après d’un communiqué condamnant le nazisme mais, quelques mois plus tard, le chef de l’Etat avait fait une rechute en affirmant, chattemite : « Moi, je n’approuve pas ce qu’a fait Hitler, et je n’approuve pas non plus ce qu’a fait Israël. Quand il est question de la mort d’autant de gens, il est déplacé de se demander qui est le plus barbare. »
L’idéologie génocidaire du président turc se déploie sans vergogne dans son négationnisme sur l’extermination des Arméniens, perpétrée en 1915 par l’Etat turc, avec la bénédiction des autorités musulmanes (1 million et demi de morts). Encore une similitude avec l’hitlérisme : Erdogan approuve les politiques de liquidation ethnique. Selon la version officielle turque, qui ne tient pas debout, ce prétendu génocide aurait été, en réalité, une guerre civile, provoquée par la minorité arménienne, qui aurait fait à l’époque quelques centaines de milliers de victimes dans les deux camps. Sornettes !
Après les Arméniens, voici venu le tour des Kurdes de Syrie, qui furent les meilleurs alliés contre Daech. Erdogan qui les qualifie contre l’évidence de « terroristes », promet de « détruire un par un tous leurs nids » en continuant de traiter leurs cousins de Turquie comme des Untermenschen, corvéables à merci, assassinés à l’insu de leur plein gré par la police. Comme les nazis, le président turc procède aussi à des autodafés, mais sans feu : la théorie de Darwin sur l’évolution n’est plus enseignée en Turquie et 139 141 livres, signés Spinoza ou Camus notamment, ont été retirés des bibliothèques du pays pour être pilonnés.
Comme le Führer, Erdogan, nostalgique de l’Empire ottoman, a des rêves de grandeur, voire d’expansionnisme cultuel et culturel. C’est ce que montrent sa bougeotte diplomatique et les incursions de son parti en Allemagne, en Bosnie ou encore en France. Comme le raconte Alexandre del Valle dans un livre passionnant et détaillé, « La stratégie de l’intimidation » (1), c’est un de ses fidèles, Ahmet Ogras, homme-orchestre de la nébuleuse erdoganienne en Europe, qui préside le Conseil français du culte musulman, désormais arrimé à des positions islamo-conservatrices.
Il ne tient qu’à nous de faire redescendre Erdogan sur terre. Certes, sa formidable ascension repose sur une impressionnante croissance économique (+ 7,4 % en 2017). Mais elle est aussi le fruit de nos lâchetés munichoises. Tous les dirigeants occidentaux, y compris les plus tartarins ou les plus dynamiques, cèdent à ses chantages. Trump, Macron, même combat, pardon, même prudence, mêmes reculades. « Les choses ne sont jamais si douloureuses et si difficiles d’elles-mêmes, disait Montaigne, mais notre faiblesse et lâcheté les font telles. »
DES PRO-ERDOGAN S’OPPOSENT À
L’AFFICHAGE DE LA UNE DU «POINT»
Liberation, 27 mai 2018
Sur la dernière une du Point, le visage du président turc Ergogan semble sortir de l’ombre. Le titre, «Le dictateur», est écrit en jaune au niveau de son front, complété un peu plus bas par «Jusqu’où ira Erdogan ?» L’hebdomadaire annonce une enquête sur «sa folie des grandeurs, ses réseaux en France, son offensive sur l’Algérie, ses crimes…»
Une couverture qui n’est visiblement pas du goût des partisans du chef de l’Etat turc, actuellement en pleine campagne électorale. Vendredi, un groupe d’une dizaine de personnes est allé jusqu’à demander à un kiosquier du Pontet, près d’Avignon, de retirer l’affiche.
Remise en place sous contrôle de la gendarmerie
«Le matin, je me suis fait interpeller par un passant qui me demandait si je n’avais pas honte d’afficher ça sur mon kiosque. Puis d’autres, majoritairement turcs, sont venus. Ça râlait au café d’en face», raconte le kiosquier au Point. Après quelques échanges infructueux au sujet de la liberté de la presse, les pro-Erdogan tentent plusieurs recours : «Ils contactent le Point, le commissariat, la mairie, la société JCDecaux puis la société Médiakiosk [la société en charge des espaces publicitaires, ndlr], avant de revenir sur place, un portrait du président turc sous le bras», précise l’hebdomadaire sur son site. En Turquie, de nombreux journalistes critiques envers le pouvoir, considérés comme des «terroristes», ont été dépéchés en prison.
La tension monte, certains jeunes menacent de mettre le feu au kiosque. Finalement, c’est un employé de Médiakiosk qui est envoyé pour ouvrir la vitre et retirer l’affiche. Les partisans de l’AKP, le parti d’Erdogan, présents sur place promettent alors d’en faire de même dans toute la région. A Valence, un autre kiosquier a été contraint d’enlever la une.
A la demande du maire du Pontet, la une du magazine a été remise en place et des gendarmes surveillent les lieux. Le Point a pour sa part confirmé le maintien de sa campagne d’affichage partout en France et regrette que son numéro fasse «l’objet d’une intense campagne de dénigrement dans les médias officiels turcs et de la part d’organisation politiques franco-turques».
LA TURQUIE MENACE D’ENVAHIR LA GRÈCE
Uzay Bulut
Gatestone Institute, 20 fév 2018
Moins de deux semaines après que le ministère grec de la Défense ait annoncé que la Turquie avait violé l’ espace aérien grec pas moins de 138 fois en une seule journée, un navire de la Garde côtière turque a, le 13 février 2018, éperonné un patrouilleur des Gardes côtes grecs au large de Imia, l’une des nombreuses îles grecques dont la Turquie revendique la souveraineté.
La plupart des zones maritimes qui forment aujourd’hui le territoire de la Grèce moderne étaient sous occupation ottomane du milieu du 15ème siècle à la guerre d’indépendance grecque de 1821 et la création de l’Etat grec moderne en 1832. Mais aujourd’hui, les îles comme le reste de Grèce, sont la propriété légale et historique de la Grèce.
L’AKP (Parti de la justice et du développement) au pouvoir en Turquie et une grande partie de l’opposition apparaissent toutefois déterminés, pour ne pas dire obsédés, à l’idée d’envahir et reconquérir ces îles grecques, au motif qu’elles auraient appartenu de toute éternité à la Turquie.
En décembre 2017, Kemal Kılıçdaroğlu, chef du CHP, le principal parti d’opposition turc, a déclaré qu’à l’issue de sa victoire électorale en 2019, il « envahira et prendra le contrôle de 18 îles grecques dans la mer Egée, tout comme l’ancien Premier ministre turc Bulent Ecevit a envahi Chypre en 1974. » Il affirme qu’« aucun document » ne prouve le droit de propriété de la Grèce sur ces îles.
Meral Akşener, chef du « Parti du Bien », un nouveau parti d’opposition, a également appelé à l’invasion et à la conquête des îles. « Ce qui est nécessaire doit être accompli », a-t-elle tweeté, belliqueuse, le 13 janvier.
Enhardi par son invasion militaire d’Afrin en Syrie du Nord – dans le plus grand silence de la communauté internationale -, le président turc Recep Tayyip Erdoğan a multiplié les déclarations belliqueuses.
« Que ceux qui ont franchi la ligne en mer Egée et à Chypre, prennent garde », a déclaré Erdoğan. Il a ajouté : « Leur courage s’évanouira à la vue de notre armée, de nos navires et de nos avions … Qu’il s’agisse d’Afrin, de la mer Egée ou de Chypre, nos droits sont les mêmes. Ne croyez pas que l’exploration du gaz naturel dans les eaux de Chypre et d’autres tentatives opportunistes en mer Egée nous aient échappé.
« Tout comme nous déjouons divers complots [dans la région] grâce aux opérations Bouclier de l’Euphrate (Euphrate Shield) et Rameau d’Olivier (Olive Branch) [en Syrie], et bientôt à Manbij et ailleurs, nous déjouerons les vilains calculs qui se font jour à nos frontières méridionales … Nos navires de guerre et nos forces aériennes surveillent de près la zone pour intervenir dès que nécessaire. »
Dans une claire référence à l’Empire ottoman, Erdoğan a déclaré : « Ceux qui pensent que nos cœurs n’aspirent plus aux terres que nous avons dû quitter en larmes il y a cent ans, ont tort.
« Nous le répétons à chaque fois que nécessaire, la Syrie, l’Irak et bien d’autres lieux sur la carte n’ont pas moins d’importance dans nos cœurs que notre propre patrie. Nous luttons pour qu’aucun drapeau étranger ne flotte là où l’adhan [appel islamique à la prière dans les mosquées] est lancé.
« Ce que nous avons accompli jusqu’ici [est une pâle copie] des projets immenses et des conquêtes majeures [que nous projetons] dans les prochains jours, inshallah [Plaise à Allah]. »
La dynastie ottomane et son empire ont été créés par un chef nomade turkmène aux environs de 1300. Pendant 600 ans et plus qu’à duré l’empire ottoman, les Turcs ottomans, qui faisaient également office de califat islamique, ont lancé régulièrement des guerres de djihad, d’invasion et d’occupation sur trois continents.
Les néo-ottomans de Turquie parlent fièrement aujourd’hui encore de djihad (guerre sainte islamique) contre les kafirs (infidèles). Le chef de la Diyanet, la Direction des affaires religieuses financée par l’État, a évoqué l’invasion militaire d’Afrin comme un « djihad ».
Ce vocabulaire fait sens quand on sait que les Turcs musulmans ne doivent leur majorité démographique en Asie Mineure qu’à des siècles de persécutions et de discriminations contre les habitants chrétiens, yézidis et juifs de la région. Au XIe siècle, les djihadistes turcs d’Asie centrale ont envahi et conquis l’Empire byzantin chrétien de langue grecque, ouvrant la voie à la turquisation graduelle et à l’islamisation de la région par des méthodes telles que le meurtre, l’enlèvement, le viol et les conversions forcées.
La plus importante opération antichrétienne des Turcs a eu lieu au 20ème siècle. De 1914 à 1923, les Turcs ottomans se sont livrés à un authentique génocide contre les Grecs, les Arméniens et les Assyriens (Syriaques / Chaldéens). Ce meurtre de masse a été constamment nié, et n’a pas empêché la Turquie de devenir membre de l’OTAN en 1952. Et le souvenir du génocide n’a pas empêché la Turquie, trois ans après son adhésion à l’OTAN, de monter un pogrom anti-grec à Istanbul, ni d’expulser de force les quelques Grecs qui demeuraient encore en Turquie en 1964.
C’est précisément parce que les Turcs n’ont jamais été tenus responsables de leurs actes criminels et de leurs agressions qu’ils continuent de menacer la sécurité et la souveraineté de leurs voisins. Il serait temps que l’ Occident se réveille et mette Ankara au pied du mur.
BATAILLE D’AFRIN : «SILENCE, ON NE MASSACRE QUE DES KURDES…»
Pierre Rehov
Figaro, 13 mars, 2018
Qui veut tuer son chien, l’accuse de la rage. Cet adage n’a peut-être pas sa traduction en langue turque, mais cela fait plusieurs décennies que les Ottomans l’ont adapté à leur façon contre la population kurde. Pour Erdogan, cela ne présente aucun doute: afin d’éliminer librement cette minorité sans provoquer l’opprobre, il suffit de l’accuser de terrorisme.
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D’où vient le goût de fût de chêne dans le vin ?
Étant donné le peu de réactions de l’Occident, alors qu’au moment où sont rédigées ces lignes les forces turques, malgré leur démenti, se livrent à un nettoyage ethnique majeur autour d’Afrin, ville située au nord de la Syrie, il semble que la technique continue de faire ses preuves.
Des centaines de vies innocentes ont déjà été perdues sous les bombardements et les opérations coups de poing des milices affiliées à l’armée d’Ankara. Les hôpitaux sont débordés et le nombre de blessés augmente chaque heure dans des proportions affligeantes.
Pourtant, personne ne fait rien. Pas même l’ONU, qui se contente, par la voix de son coordinateur humanitaire régional Panos Moumtzis, d’émettre des «rapports troublants».
Tragiquement, les Kurdes, peuple d’environ 34 millions d’âmes réparties essentiellement entre quatre pays, la Turquie, l’Iran, l’Irak et la Syrie, ont déjà souffert plusieurs massacres. Notamment en 1988, sous le joug de Saddam Hussein, lorsque ce dernier chargea son cousin, Ali Hassan Al Majid de leur «solution finale». La tentative de génocide, connue sous le nom d’Anfal, dont le point culminant fut le bombardement au gaz toxique d’Halabja le 16 mars 1988, provoqua la mort de 100 000 à 180 000 civils selon les estimations, tous seulement coupables d’être Kurdes.
Arrêté pendant l’intervention américaine, puis appelé à répondre de ses crimes devant la cour pénale internationale, Al Majid, surnommé «Ali le chimique» se serait emporté en entendant ces chiffres: «C’est quoi cette exagération? 180 000? Il ne pouvait pas y en avoir plus de 100 000!»
Seulement, si la majorité des médias a couvert les deux interventions américaines en Irak, pour réfuter l’hypothèse de la possession d’armes de destruction massives par Saddam Hussein lors de la seconde invasion, il est difficile de retrouver des unes scandalisées, de grands placards accusateurs, ou des archives d’émissions consacrées à cette tragédie.
Pour comprendre la raison derrière les massacres à répétition des Kurdes de Turquie et maintenant de Syrie par le gouvernement d’Ankara, il faut remonter au début du vingtième siècle.
La création d’un État Kurde est une vieille promesse, datant de la conférence de Paris de 1919, où une frontière proposée par la délégation kurde devait couvrir quelques morceaux de la Turquie et de l’Iran et empiéter en Irak et en Syrie. Une nouvelle limite territoriale, plus réduite, fut proposée l’année suivante au traité de Sèvres. Seulement l’espoir d’un Kurdistan indépendant fut immédiatement étouffé par le refus de Mustafa Kemal de signer le traité. En 1945, un second tracé, couvrant cette fois une plus grande partie de la Turquie, fut proposé lors de la première conférence des Nations Unies à San Francisco.
Le seul État véritablement kurde ne vit le jour que pendant quelques mois dans une toute petite partie de l’Iran, sous le nom de République de Mahabad, dirigée par Mustafa Barzani, avant d’être écrasée avec une brutalité effroyable par le régime du Shah.
Malgré leur situation dramatique, et le refus de reconnaître jusqu’à leur identité par les régimes turcs successifs, leur langue et leurs coutumes faisant même l’objet d’interdiction par Ankara, les Kurdes de Turquie n’ont commencé à se révolter qu’à partir des années soixante-dix, avec la création du «Parti des Travailleurs Kurdes», le PKK, d’essence marxiste-léniniste.
Mais, même si leurs méthodes étaient issues de concepts révolutionnaires violents et dépassés, c’est leur velléité d’indépendance et leur idée de société calquée sur les valeurs humaines de l’Occident, notamment concernant l’égalité entre les sexes, qui représentaient le vrai danger pour Ankara.
S’ensuivirent donc une guérilla et un cycle de violences soigneusement exploités par la Turquie qui a consacré des millions de dollars en communication jusqu’à obtenir l’inscription du PKK sur la lise des organisations terroristes, en Europe et aux USA.
L’étiquette «terroriste» appliquée aux dissidents kurdes permit aussitôt à la Turquie de se livrer sereinement à des purges visant tous les secteurs de la société, sans recevoir la moindre condamnation. Il suffisait désormais à Ankara d’accuser un contestataire de «sympathie envers le terrorisme» pour le jeter en prison, où il croupirait pendant des mois dans l’attente de l’ouverture d’un procès.
En 1999, l’arrestation d’Abdullah Öcalan, leader du PKK, permit l’établissement d’un cessez-le-feu précaire, jusqu’à l’élection d’Erdogan, déjà bien décidé à régner d’une main de fer et à étouffer toute forme de dissidence, ainsi qu’il l’a prouvé depuis.
Les hostilités ont repris en 2004, un an après son arrivée au pouvoir, la Turquie affirmant que 2 000 combattants du PKK en exil avaient franchi la frontière, tandis que l’organisation mise en sommeil reprenait son nom et accusait l’armée de ne pas avoir respecté la trêve.
Les atrocités commises par le gouvernement turc contre sa minorité kurde ne sont pas sans rappeler le génocide arménien, nié jusqu’à ce jour par le gouvernement d’Ankara, bien que largement documenté par des observateurs extérieurs et désormais reconnu par un grand nombre de pays occidentaux. La méthode est sensiblement la même: accusations sans fondement, procès expéditifs, épuration locale sans témoins, négation ou justification auprès de la communauté internationale.
La cause kurde, trahie par Obama dès son arrivée au pouvoir malgré les promesses faites par son prédécesseur, trouva cependant un certain regain par sa participation à la lutte contre l’État Islamique à partir de 2014.
Cela nous conduit à Kobane, où hommes et femmes kurdes, armés seulement de kalachnikovs, résistèrent pendant des jours aux tanks et à l’artillerie de Daech, pour remporter une incroyable victoire, célébrée dans le monde entier comme le triomphe du bien sur le mal.
Les images désormais célèbres de ces femmes aux traits farouches et au regard fier, vêtues d’un vieux treillis, les cheveux dans le vent, sous fond de carcasses d’automitrailleuses et de tous-terrains carbonisés, inspirent le film en cours de production de Caroline Fourest, «Red snake» qui veut rendre hommage à leur courage exemplaire, contre la lâcheté et l’ignominie des combattants du khalifat.
Malheureusement, les mêmes idées d’indépendance, de liberté et d’égalité sur fond de féminisme, qui stimulèrent la résistance kurde contre l’obscurantisme génocidaire de Daech, sont devenues les causes du carnage actuel, perpétré sous prétexte de lutter contre le «terrorisme» par le dirigeant Turc.
En s’attaquant à l’YPG et à l’YPJ (les unités de protection des femmes et du peuple) qui avaient réussi à établir une enclave de paix relative dans la région d’Afrin, Erdogan, en passe de rétablir une forme de dictature islamique dans une Turquie pourtant moderne, envoie un message clair au reste du monde.
Hors de question que des minorités non acquises à sa version de l’Islam puissent se targuer d’avoir obtenu la moindre victoire. Et surtout, aucune velléité d’indépendance ne saurait être tolérée par son gouvernement.
L’YPG et YPJ étant soutenus, du moins logistiquement, par le gouvernement américain, le premier souci d’Erdogan est de faire passer sous silence les atrocités commises par son armée. Tandis que l’accès aux réseaux sociaux a progressivement été limité dans toute la Turquie, les arrestations des protestataires se multiplient.
En janvier de cette année, des centaines d’universitaires du monde entier ont signé une pétition appelant le gouvernement turc à «arrêter le massacre». La seule réaction d’Ankara a été d’arrêter trois professeurs de l’université d’İstanbul signataires de la pétition et de les faire condamner pour «propagande terroriste».
Alors, tandis que les tanks turcs encerclent Afrin et que l’armée de l’air pilonne les positions de l’YPG et de l’YPJ, sans se soucier du nombre de victimes civiles, des rapports signalant même l’utilisation du napalm, il reste à se demander combien de temps les alliés de la Turquie continueront à détourner un regard pudique des exactions commises par ce membre de l’OTAN.
De son côté, frustré dans son incapacité à résoudre rapidement son problème kurde par une solution finale, Erdogan, que rien ne semble retenir dans sa volonté avouée de reconstituer l’Empire Ottoman, a été jusqu’à s’emporter contre ses alliés de l’Alliance Atlantique: «Nous sommes en permanence harcelés par des groupes terroristes à nos frontières. Malheureusement, jusqu’à aujourd’hui, il n’y a pas eu une seule voix ou un seul mot positif de l’OTAN» s’est-il agacé.
Erdogan ne connaît sans doute pas la phrase célèbre du politicien et philosophe Edmond Burke: «Pour que le mal triomphe, seule suffit l’inaction des hommes de bien.»
SOUS ERDOGAN, LA TURQUIE GLISSE VERS LA DICTATURE
David Bensoussan
La Press, 1 juin, 2018
En arrivant au pouvoir, le président turc Erdogan a joué la carte de l’islam modéré et démocratique. Il a graduellement érodé la démocratie et l’héritage laïque d’Atatürk. Pour atteindre ses buts, soit une réélection qui lui permettrait de rester au pouvoir jusqu’en 2029, Erdogan a eu recours à maints atouts démagogiques.
Le populisme d’Erdogan a fait appel à la fierté nationale voulant que « la Turquie occupe une place de puissance mondiale ». Le passé ottoman est glorifié et l’anniversaire de la conquête de Constantinople en 1453 est fêté en grande pompe. Des haies d’honneur de soldats en tenue de combat ottomane des siècles passés accueillent les visiteurs dans un nouveau palais présidentiel à Ankara occupant une superficie de 200 000 mètres carrés.
Le gigantisme caractérise les ambitions d’Erdogan qui prévoit dépenser 325 milliards en 5 ans : un nouvel aéroport ultramoderne en construction sur une superficie de 76,5 km2 occupe 35 000 ouvriers et va coûter 12,5 milliards de dollars ; un canal de 45 km reliant la mer Noire à la mer de Marmara – qui ne sera guère rentable – est également planifié ; la nouvelle mosquée géante Çamlica sur les hauteurs d’Istanbul devrait pouvoir accueillir 60 000 fidèles.
L’échec du coup d’État de 2016 a permis à Erdogan de mettre aux arrêts 50 000 personnes, d’en limoger 150 000 autres et d’instaurer l’état d’urgence.
Les accusations de trahison sont vite faites, l’internet est surveillé et la presse a été muselée ou achetée. Plus d’une centaine de journalistes croupissent en prison. Ces derniers – ou ce qu’il en reste – ne peuvent couvrir qu’un champ restreint de sujets et vivent dans la crainte de faire l’objet d’une accusation d’insulte à la présidence, ce qui est passible d’emprisonnement. Même les ONG font l’objet d’accusations de liens avec des organisations terroristes. En Turquie même, la vague d’arrestations et de licenciements a été suivie hâtivement par la création de nouveaux postes au sein de la fonction publique avec des critères d’embauche douteux pour engager 32 000 personnes dans les forces de sécurité ainsi que 4000 juges.
La trêve avec les Kurdes a été abandonnée, et toutes les entités kurdes sont considérées comme des sympathisants de mouvements terroristes. La campagne contre les Kurdes d’Afrin, en Syrie, a été l’occasion de mousser la fierté nationale turque et de bâillonner toute contestation. Le chef du parti kurde est en prison, et la campagne qui mènera aux élections du 24 juin est loin de se dérouler en toute équité.
En vue de prendre le leadership des États musulmans, Erdogan a tenté d’organiser des conférences panislamiques dans lesquelles les États arabes se sont à peine montrés.
Le discours anti-israélien toxique est des plus intolérants. Les relations avec l’Amérique, l’Europe et l’OTAN sont tendues : Erdogan voit la main de la fondation de Fethullah Gülen partout et exige son extradition des États-Unis. Un comité du Sénat américain a passé un amendement visant à écarter la Turquie, partenaire de l’OTAN, du programme de livraison des F-35 du fait qu’Ankara a acheté le système de défense antiaérien S-400 à la Russie. Des officiels turcs de l’entourage d’Erdogan, dont l’ancien ministre de l’Économie, risquent d’être inculpés pour avoir contourné l’embargo des Nations unies contre l’Iran.
Erdogan menace l’Europe d’un flux de réfugiés syriens encore plus grand, bien que l’Allemagne ait versé plusieurs milliards pour que cela ne se produise pas. Qui plus est, les pays d’Europe sont inquiets de l’orchestration de la propagande islamique et nationaliste turque au sein même des ressortissants turcs dans leur pays, notamment à la veille des élections. Le magazine français Le Point, qui a présenté le président turc comme un dictateur et comparé son ascension à celle d’Hitler, a dit faire l’objet de harcèlement.
Erdogan voit la conspiration partout et accuse à tour de bras l’Occident et les chefs d’État européens. Dans un sondage de Metropoll, 42 % des sondés turcs pensent que la chute de la livre turque est une conspiration des puissances étrangères. En 2013, le dollar américain s’échangeait contre 2 livres turques, comparé à 4,5 livres turques en 2018. Cette situation rend difficile le remboursement de la dette corporative qui s’élève à 300 milliards. Le déficit atteint 6 % du PNB et la dette gouvernementale est de 28 % du PNB. Bien que le ratio cours-bénéfice (price-earnings ratio) du marché turc soit inférieur à 7, l’influx de capital a baissé compte tenu des politiques gouvernementales turques, ce qui rend encore plus difficile le remboursement de la dette. Le taux d’inflation est de 10,8 %, le chômage atteint 10,8 % et l’économie turque pourrait s’effondrer.
S’il est réélu, Erdogan a promis de s’octroyer encore plus de droits et de centraliser la gouvernance sous sa houlette. Il promet aussi d’intervenir dans la politique monétaire et de rendre la banque centrale moins indépendante. Cette annonce a fait chuter la cotation de la Turquie par l’agence de notation financière Fitch dans la catégorie dite « junk ». De ce fait, la Turquie est rétrograde sur plus d’un plan.
Actualité
CE QU’A DIT LE PREMIER MINISTRE NETANYAHU AU
PRÉSIDENT FRANÇAIS MACRON VA VOUS SOUFFLER
Dreuz, 6 juin, 2018
Voici les remarques du Premier ministre Benjamin Netanyahu lors de sa rencontre avec le Président français Emmanuel Macron, mardi 5 juin 2018, à Paris :
« Merci, Président Macron, Emmanuel, pour votre chaleureuse hospitalité. Je trouve que nos conversations répétées, y compris la plus récente, ont été très utiles, très productives.
Nous ne pouvons évidemment pas discuter publiquement de tout ce dont nous avons discuté en privé, mais je pense que ces échanges sont très importants pour faire progresser la sécurité, la stabilité et la prospérité dans notre région et, évidemment, pour aider nos deux pays à progresser vers l’avenir dans des domaines tels que la technologie, la science et la culture.
Nous sommes des alliés naturels. Nous partageons les valeurs de la démocratie, de la paix et du pluralisme. Nous allons parler de culture aujourd’hui. Comme beaucoup d’Israéliens, j’ai été élevé avec Alexandre Dumas, Victor Hugo et Émile Zola – on en reparlera plus tard. Ce n’est pas étrange pour nous, cela fait partie de notre patrimoine. Nous avons un héritage commun.
Nous avons une communauté – une merveilleuse communauté juive française, 200 000 d’entre eux ont émigré en Israël et forment un pont humain naturel, nous sommes donc des partenaires naturels, et nous sommes deux démocraties.
Et aujourd’hui, les démocraties, la France et Israël, toutes les démocraties, partagent un défi commun – il y a deux mots – il s’appelle l’Islam radical.
Il défie non seulement les démocraties, mais aussi les musulmans. Il tue les musulmans. Il leur fait des choses horribles. Et il a deux grandes sources d’agression : L’un d’eux est le militant sunnite, d’abord dirigé par Al-Qaida et maintenant dirigé par Daesh et qui a été en grande partie écrasé en Syrie et en Irak. Nous devons nous assurer qu’ils n’ont pas d’autres avant-postes, car c’est ici qu’ils envoent leurs tueurs pour attaquer la France, l’Europe et le reste du monde.
Vous avez dit à juste titre qu’Israël et la France coopèrent et partagent des renseignements. Je ne peux que dire aux citoyens français que je crois que ces échanges ont sauvé de nombreuses vies.
C’est très important pour nous et je crois, comme vous l’avez dit, c’est très important pour vous, alors cette coopération va s’intensifier parce qu’elle est tellement importante pour la sécurité de nos nations.
Défier Daesh est une chose, mais il y a une autre source [de danger] et l’autre source de l’islam radical sont les chiites militants dirigés par l’Iran.
Nous faisons tout ce que nous pouvons pour empêcher les desseins agressifs de l’Iran, qui finira par déstabiliser non seulement le Moyen-Orient dans ses efforts pour conquérir le Moyen-Orient, mais aussi l’Europe et le monde.
Vous avez perdu 250 personnes ici dans des attentats terroristes par le fait d’une partie de ce radicalisme. Vous ne voulez plus avoir cela.
Ainsi, en plus de lutter contre le terrorisme par le biais de la coopération en matière de renseignement, Israël mène également cette bataille au Moyen-Orient en combattant Daesh au Moyen-Orient, mais aussi en combattant l’Iran.
La plus grande menace pour le monde d’aujourd’hui est, à mon avis, les armes nucléaires entre les mains d’un régime islamique radical comme Téhéran. Les archives nucléaires que nous avons découvertes récemment ont prouvé que l’Iran a menti au monde au sujet de son programme d’armes nucléaires, et je crois que le moment est venu d’exercer le maximum de pression sur l’Iran pour s’assurer que son programme nucléaire n’ira nulle part.
Je tiens à préciser que je n’ai pas demandé au président Macron de rompre l’accord. Je pense que les réalités économiques vont décider de cette question, donc ce n’est pas ce sur quoi nous nous sommes concentrés.
Ce sur quoi nous nous sommes concentrés, et ce sur quoi je me suis concentré, c’est l’arrêt de l’agression iranienne dans la région. Plus précisément, l’objectif d’Israël, qui devrait être partagé par tous ceux qui recherchent la paix, la prospérité et la stabilité au Moyen-Orient – c’est une Syrie reconstruite… Je pense que le précurseur de cela, la condition préalable à cela est que l’Iran quitte la Syrie – toute la Syrie. Il n’a rien à faire là. Et nous devons bloquer les plans de l’Iran pour transporter son armée et ses armes, des armes sophistiquées et mortelles vers la Syrie, à partir de laquelle ils cherchent à attaquer Israël.
Le dirigeant de l’Iran, l’ayatollah Khamenei, a dit il y a deux jours que son objectif est d’éradiquer Israël et, à cette fin, ils veulent poursuivre leur programme nucléaire, mais aussi [développer] d’autres armes, les rapprocher d’Israël pour qu’ils puissent tirer sur nos villes et nos citoyens. Nous n’accepterons pas cela. Je tiens à dire que cette position est commune à l’heure actuelle dans tout le Moyen-Orient, mais pas seulement pour nous, Israéliens, mais aussi pour de nombreux pays arabes, qui sont eux-mêmes menacés par l’agression iranienne. La chose la plus simple, la plus directe et la plus nécessaire sur laquelle nous devons nous concentrer maintenant, c’est de faire sortir l’Iran de Syrie.
Ce que vous avez vu ces dernières semaines ne sont pas des manifestations pacifiques. Ce sont des émeutes violentes organisées par le Hamas. Ils utilisent des boucliers humains pour déplacer leurs terroristes sur place, ils veulent enlever des Israéliens, ils veulent assassiner des Israéliens.
Ces protestations sont payées par le Hamas, organisées par le Hamas. Elles sont payées par le Hamas et elles cherchent à prendre d’assaut Israël, à capturer des civils ou des soldats juste à côté de la clôture, à quelques mètres de la clôture, de la frontière, et elles brûlent nos champs. Ce ne sont pas des civils. Et un jour, le jour qui a fait le plus grand nombre de victimes – il y a eu 62 victimes – le Hamas a déclaré ouvertement qu’il y avait 50 des 62 terroristes du Hamas [parmi les victimes]. Nous avons leurs noms, nous avons leurs photos. Donc, ce n’est pas une hypothèse.
Nous avons le droit de nous défendre. Nous exerçons ce droit. Nous cherchons à le faire par des moyens non létaux et nous ne réussissons pas parce que le Hamas veut que ces gens soient tués.
J’ai dit il y a quelques minutes : ‘imaginez que vous avez l’équivalent d’environ 20 millions de personnes qui sont gouvernées par un régime terroriste tyrannique et qui veulent prendre d’assaut la France’. Ils disent : ‘Nous voulons entrer en France, nous voulons détruire la France, nous voulons brûler Paris et quand nous traverserons la frontière française, nous tuerons tout citoyen français sur lequel nous pouvons mettre la main’. Évidemment, vous agiriez de toutes les manières possibles pour empêcher que cela se produise et c’est exactement ce que fait Israël.
Ici, je pense qu’il y a un changement d’attitude dans certaines parties du monde arabe parce qu’elles le comprennent. Ils en ont assez de cette guerre contre Israël, de cette tentative de détruire Israël. Ils comprennent qu’il existe un partenariat potentiel avec Israël pour la sécurité contre l’Iran et contre l’islam radical d’où qu’il vienne, mais aussi pour un avenir meilleur, parce qu’ils croient qu’ils peuvent… ces pays arabes croient qu’ils peuvent se joindre à la technologie israélienne pour avoir de l’eau, de l’agriculture, de l’air plus propre, des technologies de l’information et tous les services de santé.
Toutes ces choses sont possibles, et je pense que vous devriez savoir qu’elles se produisent déjà sous la table. Il y a un changement. Et je crois qu’en fin de compte, c’est le plus grand espoir de paix.
Nous devons affronter les radicaux et les terroristes, mais en même temps, nous devons saisir les occasions de faire avancer un nouvel avenir, une vie meilleure, et c’est en train de se produire. C’est ce qui se passe en ce moment même où nous parlons, au Moyen-Orient.
C’est aussi vrai pour Israël et la France parce qu’en combattant les forces du passé, nous embrassons l’avenir. Et nous comprenons tous les deux la valeur de l’innovation, la valeur des technologies transformatrices comme l’intelligence artificielle, les mathématiques quantiques et l’informatique quantique – ce ne sont pas des mots étranges. Ce sont de vrais mots, ils changent fondamentalement la vie des gens. Ils créent de nouvelles opportunités.
Je pense que pour qu’ils s’épanouissent, il faut un climat économique qui récompense l’initiative, récompense l’entreprise, et je suis avec beaucoup d’admiration, Emmanuel, vos efforts, des efforts vaillants en France pour créer ces possibilités. Je connais le grand potentiel que vous avez dans ce pays, les grandes ressources disponibles – les ressources humaines. Nous pensons qu’Israël et la France peuvent faire beaucoup plus ensemble. Séparément, nous faisons beaucoup de choses, ensemble, nous pouvons réaliser des choses encore plus grandes.
Je tiens à vous féliciter pour cela, tout comme je tiens à vous féliciter pour la lutte contre l’antisémitisme. C’est une position que vous avez toujours adoptée. Je pense que c’est important parce que l’antisémitisme montre sa vilaine tête, ici, et le fait que vous prenez résolument position contre lui est important.
Vous avez dit à juste titre que l’antisionisme est de l’antisémitisme.
Vous pouvez entendre : ‘eh bien, je n’ai rien contre les Juifs, mais je ne pense pas qu’il devrait y avoir un État juif’, ce qui est essentiellement ce que les antisionistes disent. Nous comprenons qu’il s’agit d’hypocrisie, et je suis heureux que vous ayez clairement pris position contre cela.
Je veux continuer à avoir cette coopération. J’ai hâte, dans quelques minutes, de parler de notre base culturelle commune et de notre objectif commun d’innovation et de transformation, et je crois qu’ensemble, nous réussirons.
Merci pour cette réunion et merci pour cette soirée et bien d’autres soirées. Merci Emmanuel. »
VISITE DE NETANYAHOU À PARIS:
“DÉPLACÉ APRÈS CE TERRIBLE MASSACRE”
I24, 4 juin, 2018
En cause, pour le Syndicat national des journalistes (SNJ), le SNJ-CGT et la CFDT Journalistes: “la répression à Gaza contre la population civile (…) a fait plus de 100 morts et quelques 8.000 blessés par des tirs à balles réelles”, et “parmi les victimes figurent des enfants, des jeunes et des secouristes”.
En outre, “lors de ces manifestations les tireurs d’élite de l’armée (israélienne, ndlr) visent délibérément les journalistes palestiniens pourtant reconnaissables à leur gilet PRESSE”, s’insurgent les trois syndicats, dans un communiqué commun.
“Le monde entier l’a considéré comme un massacre, des gens désarmés ont été tués par une armée surarmée”, s’est insurgé M. Cadiot à i24NEWS.
“Il faut que cesse la répression contre les civils désarmés, contre nos confrères palestiniens et que tous les journalistes arrêtés et incarcérés soient libérés”, plaident ces organisations.
Dans ce texte, ils jugent “inconcevable” la visite de Benyamin Netanyahou, et appellent le président français à lui “demander des comptes”.
La Saison croisée France-Israël, une série inédite d’événements culturels qui vont se dérouler ces six prochains mois dans les deux pays, devait débuter jeudi soir par une “nuit de la philosophie” à Tel-Aviv, selon l’Institut français.
Elle sera inaugurée en grande pompe le 5 juin au Grand Palais à Paris par le président Emmanuel Macron et le Premier ministre israélien.
“Nous ne sommes pas contre cette saison croisée France-Israël mais ce n’est pas le bon moment, nous pensons qu’il faut la reporter,” a-t-il estimé.
La Saison sera clôturée en novembre 2018 par un concert à Paris de la chanteuse israélienne Noa, entourée de musiciens des deux pays.
JORDANIE: FACE À LA CONTESTATION SOCIALE,
LE ROI CONVOQUE SON PREMIER MINISTRE
Times of Israel, 4 juin, 2018
Le roi de Jordanie Abdallah II a convoqué son Premier ministre lundi sur fond de protestations sociales qui secouent le royaume depuis plusieurs jours, a-t-on appris de source gouvernementale.
« Le roi Abdallah II a convoqué le Premier ministre Hani Mulqi ce lundi avant midi (09H00 GMT) et cela pourrait aboutir à sa démission », a dit à l’AFP cette source gouvernementale sous le couvert de l’anonymat.
- Mulqi, à la tête du gouvernement depuis mai 2016, est depuis plusieurs jours l’objet de la vindicte populaire après des mesures dénoncées par la population, notamment un projet d’impôt sur les revenus et des hausses des prix du carburant et de l’électricité.
Dimanche soir, quelque 5 000 manifestants se sont rassemblés devant les locaux du Premier ministère à Amman, réclamant le départ de M. Mulqi. « Ecoute-nous Mulqi, le peuple jordanien ne s’agenouillera pas », ont crié le manifestants, répétant en chœur « le peuple veut la chute du gouvernement ».
Ces manifestations, les plus importantes en cinq ans, se déroulent depuis plusieurs jours, de nuit, à Amman et dans d’autre villes du royaume, selon des correspondants de l’AFP. Elles ont lieu en plein ramadan, mois de jeûne musulman durant lequel la vie nocturne est traditionnellement plus animée.
« Celui qui augmente les prix cherche à enflammer le pays », « Nous sommes le peuple, nous sommes la ligne rouge » ou encore « peuple souverain, patrie souveraine », scandent les manifestants.
Le projet de loi fiscal a été présenté sur les recommandations du Fonds monétaire international (FMI). Il prévoit une augmentation d’au moins 5% des impôts pour les particuliers et impose désormais les personnes ayant un salaire annuel de 8 000 dinars (environ 9 700 euros). Les impôts des entreprises doivent eux augmenter de 20 à 40 %.
Le FMI a approuvé en 2016 une ligne de crédit de 723 millions de dollars sur trois ans pour le royaume. En contrepartie, Amman s’est engagé à mettre en place des réformes structurelles et à réduire progressivement sa dette publique à 77 % du PIB d’ici 2021, contre 94 % en 2015.
L’accueil de centaines de milliers de réfugiés syriens pèse également sur l’économie du pays, dépourvu de ressources naturelles.
Le roi Abdallah II a appelé samedi soir le gouvernement et le Parlement à « mener un dialogue national global et raisonnable à propos du projet de loi sur l’impôt », estimant « injuste que le citoyen paie seul les conséquences des réformes fiscales ».
MIRI REGUEV REMET LA BALLE AU MILIEU DU STADE
Shraga Blum
LPH Info, 6 juin, 2018
Essuyant de nombreuses critiques depuis l’annulation de la rencontre Israël-Argentine, la ministre de la Culture et des Sports Miri Regev a donné une conférence de presse dans laquelle elle met les choses au point.
La ministre a commencé par évoquer la question du choix de Jérusalem: “Je veux aborder la critique abjecte qui se répand depuis hier selon laquelle ce serait la décision de faire jouer la rencontre à Jérusalem qui serait à l’origine de l’annulation de la part de l’équipe argentine. Il n’y a pas de mensonge plus grand que celui-ci. L’équipe d’Argentine n’a jamais exprimé d’opposition au fait que le match se joue à Jérusalem. Bien au contraire, l’idée d’une telle rencontre est née du souhait de Lionel Messi de venir visiter Jérusalem, et de rendre au Kotel ainsi qu’au Saint Sépulcre. Combien de stupidités peut-on entendre??!! L’honneur national a-t-il disparu? Qu’est ce qui se passe ici?
Concernant l’annulation elle-même Miri Reguev a dit: “A part les lourdes pressions qui se sont exercées durant les derniers mois, la vraie raison qui a fait pencher la balance ont été les menaces de mort reçues par Lionel Messi et sa famille de la part d’organisations terroristes”. Miri Reguev a dénoncé “une forme nouvelle-ancienne de terrorisme” qui menace les sportifs ou les artistes qui voudraient se rendre en Israël. “En 1972 c’était Arafat et Septembre Noir, aujourd’hui c’est Jibril Rajoub, son disciple, qui continue sa méthode.
Miri Reguev a également révélé que d’intenses négociations s’étaient tenues durant les 24 dernières heures par différents canaux afin d’empêcher l’annulation . Elle a rajouté qu’Israël interviendra auprès des instances internationales concernées afin d’éviter à l’avenir une situation où des sportifs serons soumis à des pressions voire à des menaces sur fond politique. “Aujourd’hui c’est Israël, demain cela peut être un autre pays. Le terrorisme est du terrorisme et il ne connaît pas de frontières”.
Enfin, la ministre de la Culture et des Sports sévèrement critiqué l’attitude des députés de l’opposition, y compris les réactions de joie chez certains; “Des députés de gauche se sont joints à ceux de la Liste arabe unifiée. Que Tibi et Zahalka soutiennent le terrorisme, on le sait, mais que Gabbaï, Yehimovich, Schmuli ont joint leur voix et ont dirigé leurs critiques vers nous?? (…) Ils soutiennent le terrorisme par leur attitude”.
Plus tard dans l’après-midi, Shlomi Barzel, porte-parole de la Fédération israélienne de Football a apporté une précision et une confirmation: il a précisé que l’éventualité d’une rencontre à Haïfa n’avait été qu’évoquée mais que le choix de Jérusalem s’était imposé dès le départ. Il a ensuite confirmé que la décision de l’équipe d’Argentine d’annuler sa venue n’était en rien liée au choix de Jérusalem.
Le président de la Fédération, Ofer Eini a quant à lui annoncé qu’une plainte serait déposée contre Jibril Rajoub auprès de la FIFA.
ORCAM: UNE RÉVOLUTION POUR LES MALVOYANTS
Guitel Benishay
LPH Info, Juin 06, 2018
Imaginons une journée dans la vie d’un malvoyant… Chaque petite chose peut devenir insurmontable: choisir ses vêtements, prendre le café dans le placard, lire le journal, etc. La société OrCam, créée en 2010, a mis au point un produit révolutionnaire. A l’origine de cette entreprise se trouvent les fondateurs de Mobileye, le Professeur Amnon Shashua et le Dr Ziv Aviram. Tout comme avec Mobileye, ils ont mis l’intelligence artificielle au service de leur projet. Mais cette fois le fondement est encore plus noble: aider des millions de personnes malvoyantes à apprécier leur quotidien et à entretenir une vie sociale.
Nous nous sommes entretenus avec Michael Haddad, responsable contrôle qualité d’OrCam et Delphine Nabeth, responsable des marchés français et belge de la société. Nous découvrons grâce à eux, un produit impressionnant tant sur le plan technologique qu’humain.
L’innovation technologique OrCam utilise les performances de la vision artificielle pour améliorer la vie des personnes atteintes de cécité, de déficience visuelle, ou présentant des troubles de la lecture. OrCam MyEye® offre une aide visuelle grâce à un dispositif mobile et discret, et via une interface très simple d’utilisation.
Michael Haddad nous retrace l’historique technique de cet appareil: ”Il y a un peu plus d’un an, le produit se constituait d’une unité de base fixée à la ceinture de la personne et reliée par un fil à une caméra et un micro, attachés à la branche des lunettes. Aujourd’hui, l’appareil est sans fil: il s’agit d’une boite de 6cm de long et 1,5 cm de large, avec deux aimants adaptés à tous les types de lunettes. L’appareil tient très bien et se fait discret”.
Ce fameux appareil est équipé d’une caméra, d’une lumière, pour être utilisé dans l’obscurité, d’un bouton on/off et d’un micro proche de l’oreille. Par ailleurs, une zone tactile permet d’effectuer certains réglages comme le volume du haut-parleur
Comment ça marche? OrCam MyEye® devient les “yeux” de la personne. Il identifie ce que le malvoyant désire lire ou voir et lui transmet dans l’oreille. Cela peut se faire de différentes façons: soit en pointant le doigt vers la page du livre ou l’objet que l’on cherche à voir, soit en prenant une photo en se servant de la zone tactile soit en configurant l’appareil pour une identification automatique. Michael Haddad affine cette description: ” OrCam MyEye® prend en considération une marge d’erreur dans le mode identification en pointant le doigt, puisque par définition, il sert à des personnes ayant une mauvaise vision, le doigt peut être mal positionné. La fonction automatique est très utile pour lire un livre, par exemple, puisque la personne n’aura pas besoin de pointer chaque page ou pour les personnes handicapées”. Delphine Nabeth insiste sur le côté intuitif de l’appareil: ”Il est configuré au départ en fonction des besoins de la personne puis il fonctionne aussi de façon intuitive et intelligente”.
Que peut-on faire avec OrCam MyEye®?
C’est là que les choses deviennent très impressionnantes. Les fonctionnalités de l’appareil sont époustouflantes et nul besoin d’être connecté à internet.
En premier lieu, OrCam MyEye® a été conçu pour assister les malvoyants au niveau de la lecture. L’appareil fait la lecture à la personne, lui permettant de rester connecté avec les annonces qui le concernent, l’actualité, ou de garder le plaisir d’un bon livre. Et il sait lire dans plusieurs langues!
Mais ce n’est pas tout. OrCam MyEye® sait aussi identifier les personnes de l’entourage de l’utilisateur, préalablement enregistrées. ”Il peut contenir jusqu’à 100 visages. Lorsque l’un d’entre eux se présente devant le ou la malvoyant(e), il dit le nom de la personne. S’il s’agit d’un inconnu, l’appareil sait dire s’il s’agit d’un homme ou d’une femme, permettant aux malvoyants de conserver une vie sociale”, développe Michael.
Autre fonctionnalité d’OrCam MyEye®, la reconnaissance des billets de banque. Ainsi, finies les angoisses au moment de payer. L’appareil vendu en Israël connait les shekels, les dollars et les euros. Ceux vendus dans le reste du monde possèdent les monnaies adaptées. “Plus de 10 langues sont déjà commercialisées”, précise Delphine, ”une 20e sont en cours de test”. Puisque nous en sommes aux courses, soulignons qu’OrCam MyEye® lit les codes-barres suivant une base de données adaptée aux langages et aux pays. Les produits achetés fréquemment peuvent aussi être enregistrés dans l’appareil et il suffit de les lui présenter pour faire ses courses quotidiennes sans risquer de se tromper.
Ajoutons aussi, la reconnaissance de couleurs et des nuances de couleurs: plus de problème d’assortiment de vêtements ou de choix dans les magasins. Le shopping devient un moment agréable.
Par ailleurs, OrCam MyEye® comprend avec rapidité deux gestes simples: la main devant pour dire STOP et arrêter la lecture ou l’identification et le signe du poignet pour connaitre l’heure. Peu importe si l’utilisateur porte une montre ou pas, l’appareil lui dira automatiquement l’heure qu’il est et s’il reste dans la position encore quelques secondes, il saura aussi la date.
On l’aura compris, OrCam MyEye® est un bijou technologique qui est surprenant dans sa simplicité d’utilisation et son utilité. “Il peut aussi fonctionner en blue tooth avec un haut-parleur”, renchérit Michael, ”et se connecter au wi-fi pour bénéficier des dernières mises à jour”.
Bien entendu l’équipe d’OrCam travaille sans cesse à l’amélioration constante du produit, notamment au niveau des langues disponibles ou d’une application sur le téléphone portable pour commander l’appareil.
Comme beaucoup des innovations israéliennes qui apportent un confort indispensable dans la vie quotidienne, OrCam MyEye® a séduit les marchés internationaux. Delphine nous explique qu’en France, OrCam a signé un accord avec Essilor pour une distribution auprès des opticiens, notamment ceux spécialisés dans la basse vision. ”En une année, notre appareil est devenu disponible dans 300 magasins en France et en un an et demi, plus de 1000 ont été vendus”.
Et Delphine l’affirme: le fait d’être une entreprise israélienne n’est pas un obstacle dans les salons professionnels ou pour être distribué à l’étranger. “Au contraire! Nous rencontrons des Professeurs, des ophtalmologistes renommés, de nombreux professionnels qui approuvent notre travail. Etre une marque israélienne dans la technologie est un gage de garantie. Le monde nous prend très au sérieux et notre présence est très demandée dans les différents salons professionnels”.
OrCam est déjà bien implanté aux Etats-Unis et en Europe. ”Une succursale doit être ouverte en Allemagne afin de distribuer encore mieux notre produit en Europe”, nous confie Delphine.
Il faut dire qu’OrCam MyEye® est un produit unique et entièrement développé et fabriqué en Israël, à l’exception des voix de synthèse. OrCam MyEye® est lauréat de plusieurs prix internationaux et fait aujourd’hui partie des sociétés évaluées à plus d’un milliard de dollars. La société ne cesse de grandir; de 100 employés en 2017, elle en compte aujourd’hui plus de 200 dont 150 ingénieurs dédiés au développement. Les trois quarts du personnel sont en Israël.
Changer la vue, changer la vie
OrCam MyEye® donne la possibilité aux quelques 285 millions de personnes malvoyantes dans le monde, de changer leur vie. Michael nous le confirme: ”L’objectif des fondateurs, après Mobileye, était de se lancer dans un produit qui procurerait du bien-être à des personnes qui en sont privées, souvent en raison de pathologies”. Les acquéreurs d’OrCam MyEye® bénéficient d’une formation à domicile et leur appareil est réglé avec leurs paramètres personnels.
”Il existe bien des appareils de synthèse vocale”, développe Delphine, ”mais ceux-ci ne sont pas portatifs, ils ont la taille d’un photocopieur”. OrCam MyEye® se transporte partout et permet une autonomie tout au long de la journée.
L’achat de cette merveille (entre 12000 et 18000 shekels selon la version) est pris en charge en partie par le ministère des affaires sociales avec une ”teoudat iver” et également avec la Koupat Holim Maccabi. En France aussi, il est possible de demander une prise en charge, sous certaines conditions.
OrCam a aussi conclu des partenariats avec des associations de malvoyants en Israël, permettant de rendre disponible l’appareil à un plus grand nombre.
Il faut dire que la technologie avancée et le bien-être qu’OrCam MyEye® procure justifient l’investissement. Michael nous raconte une anecdote parlante: ”Un monsieur qui utilise OrCam MyEye® nous a contactés. Il avait été blessé en 1973 lors de la guerre de Kippour. Grâce à OrCam MyEye®, il a enfin réussi à finir un livre qu’il avait commencé avant la guerre. Il était tellement reconnaissant!”.
Delphine et Michael, tout comme le reste du personnel d’OrCam, ne cachent pas leur fierté de travailler pour ce genre de produits qui aident l’humanité. ”Quand on voit l’émerveillement des utilisateurs, on sait que notre travail a un sens”.
Shabbat Shalom!