J. Bauer
Décidément, il y a des choses qui ne changent pas en Israël , en particulier l’art des média de minimiser les bonnes nouvelles.
Déjà en 2004, la visite officielle à Paris du Président d’Israël, Chaim Herzog, le père de l’actuel Président, était quasiment passée inaperçue par la télévision israélienne comme je le signale dans mon texte dans « 7 ans à Jérusalem ». (Citation dans le livre, page 114, 3e paragraphe.)
18 ans plus tard, la première visite officielle su Président d’Israël dans un État arabe, un évènement marquant au Proche-Orient, et aussi un évènement historique même si les « experts » détestent ce mot, est traité avec la même indifférence que celle du père. Les images à Abu-Dabi ont commencé avec un aperçu de l’incroyable différence entre les responsables politiques féminins d’Europe et Madame Herzog. Les premières s’affublent de torchons sur la tête et acceptent de se faire reléguer derrière les hommes, car elles sont des femmes et ne doivent pas choquer les dirigeants musulmans, arabes, iraniens ou turques. Madame Herzog, elle, était, soit nue-tête, soit avec in couvre-chef élégant, couvrant partiellement les cheveux, mais se présentant et étant traitée publiquement en égale.
Rien que cela aurait dû attirer l’attention des média internationaux. Ce n’était qu’un début. L’arrivée des deux leaders, émirati et israélien, devant un bâtiment monumental, tout marbre et or, plus un décor à la Walt Disney qu’une structure gouvernementale classique, la garde d’honneur présentant les armes et, surtout, l’hymne national Hatikva, avait de quoi impressionner. La télévision israélienne en a parlé après les choses « sérieuses », comme l’augmentation du coût des pâtes. Les quotidiens, sauf un. Israel Hayom, et encore de façon limitée, ont relégué cet évènement, bel et bien « historique » dans les pages intérieures.
Peut-on espérer qu’un jour, les journalistes israéliens seront capables de présenter les nouvelles, même quand elles sont bonnes.
Extrait de Sept années à Jérusalem pp. 114 (Julien Bauer, 2012, Éditions du Marais)
Lors de la visite du Président d’Israël en France, en février 2004, j’ai décidé de faire une expérience. Armé d’une feuille de papier et d’un stylo, j’ai pris note du bulletin de nouvelles de la Deuxième chaîne le 16 février. Nous parlons d’une visite officielle du Président dans une grande capitale, visite qui a occasionné un dégel des relations entre les deux pays et qui, en dehors de toute considération politique, est une source d’images pour la télévision. Peu de capitales, à la possible exception de Londres, sont capables d’organiser des cérémonies aussi impressionnantes avec la perspective des Champs Élysées, la garde républicaine, etc. La première nouvelle a porté sur les ennuis judiciaires du Premier ministre Sharon et de son fils Gilad. Que cette nouvelle passe avant la visite à Paris est un choix qui peut se justifier. Sont venues ensuite, dans l’ordre, huit informations : déclaration par l’armée israélienne que trois soldats prisonniers depuis plus de dix ans, Baumel, Feldman et Katz, étaient considérés comme morts, budget alloué à la construction de logements dans les territoires, continuation de travaux par le Waqf, le comité musulman, sur le Mont du Temple, éboulement d’une rampe au Mont, point de passage Erez entre Israël et Gaza, problème judiciaire de Naomi Blumenthal, député du Likoud, accusée d’avoir payé des nuits d’hôtel à des délégués pour obtenir leur voix aux primaires du parti, documentaire sur la prostitution, tentative d’enlèvement de la fille du propriétaire de Coca-Cola! Ce n’est qu’après plus de vingt-cinq minutes que la Deuxième chaîne a présenté, en moins d’une minute, la visite du Chef de l’État à Paris : rien n’a été dit de la chaleur de la réception, la vue des Champs Élysées a été hyper rapide… On avait l’impression que la Deuxième chaîne était gênée de présenter une nouvelle positive.